Ce sujet porte sur la question limitative de la mise en scène des images et plus généralement, le volet "exposer l’œuvre, la démarche, la pratique" et "questionner le fait artistique".
S'agissant d'une correction, je ne m'attarderais pas sur le corpus et l'axe de travail du sujet d'analyse méthodique et j'imposerai une œuvre comme objet de l'exposition.
Pour la méthodologie générale > ici
QUESTION
En vous appuyant sur des caractéristiques et des enjeux de l’œuvre que vous aurez choisie, et en respectant son intégrité, proposez et justifiez un projet d’exposition soulignant le processus de création de celle-ci
ŒUVRE
1/ Déduire une problématique issue de la thématique proposée et de l'œuvre choisie.
La thématique est ici : « Le processus de création ». L'œuvre est « une série » de tableaux du même auteur
Voici quelques formulations de problématiques à partir de ce couple de données :
- Comment donner à voir le processus de création de Claude Monet pour la série des cathédrales de Rouen ?
- Comment partager la vision de Monet, peignant les cathédrales de Rouen ?
- Comment l'exposition du processus de création de la série des cathédrales peut-il enrichir le regard sur cet œuvre ?
ATTENTION : L'œuvre n'est pas le sujet, mais l'objet de l'exposition. Le sujet est toujours le thème donné par l'énoncée de la question.
Exemple d'introduction rédigée :
Au fil des lignes qui suivent, je décrirais un dispositif d'exposition par lequel, en exposant le processus de création de la série des cathédrales de Rouen de Claude Monet, il serait possible d'enrichir le regard du spectateur sur certains aspects de l'œuvre de cet auteur. Après une présentation de la série, je continuerais en décrivant le dispositif physique et technique d'exposition que j'enrichirais de croquis et schémas précisant sa forme et sa fonction. En fin, au fil d'une visite guidée imaginaire, je démontrerais la pertinence de ce dispositif et sa portée dialectique.
2/ Présenter l'œuvre choisie
Que l'œuvre choisie ait été décrite lors de la partie 1 du sujet ou pas, il sera nécessaire de la décrire dans ce nouvel exercice. La méthode est la même que précédemment (identifier, dénoter, connoter, contextualiser). On accordera toutefois moins d'importance à l'analyse formelle et symbolique qui peuvent ici se limiter a des descriptions plus superficielles. L'enjeu porte ici surtout pour la contextualisation vis-à-vis du sujet : Le processus de création.
Quel que soit le sujet, vous devez, ici, mobiliser et contextualiser les connaissances que vous avez de l'œuvre pour valoriser le regard singulier que vous porterez, plus loin sur celle-ci. Attention à vos affirmations péremptoires. S'il est admissible d'émettre des hypothèses, il ne faut pas leur donner de valeur factuelle. Soyez prudents. Employez le conditionnel pour les formuler.
Pour l'exemple donné, je me servirai de la connaissance que j'ai de la série. Utilisant la question du point de vue de réalisation je vais la séparer en deux groupes de réalisations. Décrire chaque groupe et donner un role à chacun de ces groupes dans la série. En fin, par le biais d'une hypothèse et à l'aide d'une dénotation je poserai un regard singulier sur l'œuvre.
- La série est composée de 3 sous-séries qui mettent en image des angles de vue différents de la cathédrale.
- 26 des 30 toiles sont graphiquement très similaires et ne divergent que dans le traitement des couleurs
- J'émets l'hypothèse que les 4 premières toiles sont des "essais"
- J'émets l'hypothèse que l'auteur porte son intérêt sur l'ambiance lumineuse moins que sur la cathédrale.
Exemple de paragraphe rédigé :
La série des cathédrales de Rouen par Claude Monet est une suite de trente huiles sur toile de dimensions homogène (100 × 65 cm), réalisées entre 1892 et 1894. La série se compose en réalité de 3 sous-séries de peintures ayant pour objet la représentation de la cathédrale de Rouen et pour sujet l'étude de la lumière sur le bâtiment et l'air environnant. Très matièristes, ces toiles sont en léger relief, dû aux empâtements successifs de couleur sur le support. Les deux premiers groupes sont en général isolés. Ce sont deux paires de tableaux que l'auteur réalise à titre d'essai (brouillon). Leurs cadrages et dimensions varient des autres toiles. Le reste de la série donne à voir le portail occidental de l'édifice, à différentes heures de la journée et sous diverses conditions climatiques. Orientées au format portrait, ces peintures décrivent le monument en légère contre plongée. Le point de vue d'exécution est situé à 45° à gauche de l'édifice (pointant direction nord-est), évitant ainsi de faire face aux rayons du soleil. Le cadrage de ces vingt-six toiles est sensiblement identique et laisse à penser qu'un usage de la photographie a pu aider l'auteur dans leur réalisation. En effet, cette sous séries a été conçue depuis trois ateliers différents, situés sur la place en face de la cathédrale. S'ils sont tous bien situés dans l'angle général de la réalisation, ils divergent tous du point de vue effectivement représenté. On peut donc se dire que le réel travail effectué in-situ par l'auteur, portait surement sur la lumière perceptible et reflétée sur l'édifice depuis cette zone géographique. La palette employée dans l'exécution des toiles est très variables de l'une à l'autre. L'ensemble apparait comme un arc-en-ciel de teintes et de couleurs. La monotonie graphique du portrait que Monet tire de ce bâtiment contraste avec la richesse tonale de sa peinture qui fait vibrer le regard.
3/ Présenter le dispositif
En contextualisant votre présentation de l'œuvre, vous avez normalement commencé à faire du lien avec la problématique. Décrivez un dispositif qui découle de ces liens et appuyez-vous sur vos expériences sensibles d'exposition (les dispositifs que vous avez parcourus ou vu). Appuyez-vous aussi sur votre connaissance de la pratique et la démarche de l'auteur pour assoir votre proposition de mise en espace.
- On sait que Monet peignait plusieurs toiles en même temps qu'il disposait en "couches" face à lui et changeait régulièrement de support pour suivre la lumière.
- NOBUHIRO NAKANISHI, pour l'installation : « Layer Drawing - Cloud/Fog (2005) », proposait un dispositif qui pourrait être adapté de façon à mettre en avant le processus le travail de Monet.
- La relation au temps qui passe et aux tons changeants de la lumière ambiante sont des éléments que je veux mettre en avant dans le processus de création de Monet
- JAMES TURRELL avec les « Sky Observatory » et en particulier le « Roden Crater » propose des dispositifs qui décrivent une démarche semblable à celle de Monet.
Exemple de paragraphe rédigé :
J'imagine un espace dédié, un espace construit idéalement pour présenter cette série de peintures singulières. Circulaire, ce bâtiment serait composé de plusieurs salles sur deux niveaux. L'étage supérieur serait largement vitré pour laisser entrer la lumière naturelle. Orienté plein sud, son entrée serait au nord baignant l'espace des rayons du soleil tout au long de la journée. L'accès se ferait par un sas accueillant le visiteur qui rencontrerait les quatre premières toiles de la série ainsi qu'une biographie de l'auteur et une présentation de l'œuvre pour renseigner sur l'exposition. La salle suivante serait un hémicycle aux murs et aux plafonds partiellement vitrés et composé de 53 panneaux, 26 transparents et 27 opaques, alternés régulièrement. 26 de ces panneaux seraient couverts d'un film transparent figurant l'une des 26 toiles de la série principale. Ces reproductions seraient classées dans un ordre chromatique croissant des couleurs froides aux extrémités (est/ouest) aux couleurs chaudes au centre (sud). La clarté du jour passant au travers de ces « vitraux » serait la seule source de lumière de la salle, offrant au visiteur une immersion dans l'univers coloré de Monet. Inspiré du système établi par NOBUHIRO NAKANISHI pour ses « layer drawings » et des vitraux de cathédrales en général, il s'agirait ici de montrer comment la lumière (projetée par transparence dans la pièce) est le centre d'intérêt de l'auteur, ce à quoi il accorde le plus d'importance. Monet aurait d'ailleurs un jour déclaré qu'il avait pour ambition de "Peindre l'air". Pour maximiser l'effet, j'imagine un espace ou les panneaux muraux seraient peints en noir mat et lisse alors que le sol serait en pierre blanche et mate (du calcaire). Le plafond serait concave pour procurer une ambiance sonore réverbérante et propice à la contemplation silencieuse. La salle suivante, en sous-sol, serait accessible par un escalier en colimaçon dont chaque marche éclairée par une simple bande LED blanches sur l'arrête ferait passer du clair obscur de la salle supérieure à la peine ombre. Le passage par cet escalier conditionnerait la sensibilité visuelle du spectateur aux couleurs et aux lumières, aiguisée, comme dans une installation de JAMES TURRELL. La salle du bas, circulaire, accueillerait les 26 toiles, réparties régulièrement sur les murs et accompagnées d'un cartel d'identification. L'escalier arrivant au centre, le visiteur pénétrerait dans la salle, entouré de peintures éclairées ponctuellement par un faisceau de projecteurs doux, imitant la lumière du jour, pointés directement sur chaque toile. Au sud, un escalier droit en pente douce, guiderait vers la sortie, à l'étage supérieur en extérieur. En échos à JAMES TURRELL, il s'agirait d'éblouir le spectateur sur le chemin qui le ramènerait à la surface. Les murs, comme à l'étage seraient peints en noir. Par contre, le sol serait, lui, couvert de moquette noire, elle aussi pour matifier le son et contraster avec l'étage supérieur en proposant une ambiance feutrée. Tout le dispositif convergerait vers une perception progressive du processus de travail de l'auteur qui observe la lumière changeante sur l'objet de sa peinture au fil des heures, amenant le regardeur à revivre l'expérience progressivement à travers la lumière seule puis au travers des peintures mêmes et sortir en fin de l'œuvre comme on sort d'une caverne (métaphore socratique).
/4 RÉALISEZ ET INSÉREZ VOS CROQUIS
Soyez ici attentifs à bien rendre compte de façon efficace et synthétique de ce qui constitue le dispositif d'exposition. Ce n'est pas un concours de dessin. On n'attend pas ici de belles images, mais des images justes. Des plans, des schémas, des croquis qui complètent votre présentation sont ici attendus.
Exemple d'illustrations :
/5 CONCLUEZ PAR UNE VISITE GUIDÉE
Donnez ici à voir le point de vue du spectateur idéal et décrivez ce que vous attendez à ce qu'il éprouve dans l'espace que vous avez organisé, en relation avec l'œuvre présentée.
Exemple de paragraphe rédigé :
Visitons l'exposition. Elle s'intitule « Éblouissement ». Elle prend place dans un édifice circulaire. On y entre par une large double porte vitrée qui débouche directement sur un grand mur blanc où sont inscrits une notice biographique sur l'auteur et une présentation de la série des cathédrales. Derrière cette cimaise, sur un mur, lui aussi blanc, sont disposés de part et d'autre d'une porte ouvrant sur la salle suivante, les quatre premières toiles de la série assorties de cartels. Elles sont accrochées à environ 80 cm du sol. et illuminée par un éclairage ponctuel zénithal qui permet de mettre en valeur les couleurs et la matière de chaque peinture. La salle suivante est plus sombre et éclairée par la lumière du jour passant par des ouvertures dans les murs. Ces fenêtres verticales de 100 × 65 cm sont colorées, chacune couvertes d'une reproduction translucide différente des 26 autres toiles de la série. Réparties en arc chromatique du froid au chaud et au froid encore, de la gauche vers la droite. La lumière se reflète comme à travers ces vitraux sur le sol de la salle au plafond bombé et plonge dans une ambiance de recueillement. Au centre de cet espace, un escalier circulaire assez sombre, descend vers une salle en contrebas. Là, une lumière intense venant du centre de la pièce, éclaire les 26 originaux de Monet. Dans cet espace circulaire au sol et aux murs peints en noir et au sol de même couleur, les toiles semblent flotter dans l'obscurité, rayonnantes autour du visiteur. Au sud, un escalier en pente douce très sombre, mène vers la sortie du dispositif. L'expérience est presque religieuse. Elle attire l'attention sur la nature physique de la lumière, tantôt projetée, tantôt figurée, tantôt éblouissante, tantôt tamisée, faisant vivre une expérience maïeutique et mystique, à l'instar du travail de Monet, soutenue par une ambiance sonore et visuelle contrôlée de bout en bout.